Le CAO vu autrement

Depuis que j’accompagne des personnes voulant déposer leur demande d’asile, j’entends régulièrement qu’il doit être difficile psychologiquement de travailler dans ce milieu. C’est vrai, je ne peux pas nier qu’il y a souvent des histoires de vies compliquées à entendre. Je me refuse pourtant à réduire ces personnes à ces moments traumatisants de leurs vies, comme si on ne les définissait plus que par cela.

 

Ce que je vois depuis que j’accompagne ces hommes est tout l’inverse. Il y a des moments difficiles bien sûr, mais pas seulement. Je les vois rieurs, taquins, pleins de vie. Je vois des hommes pour qui le football est une réelle passion. Je vois H. accrocher ses dessins représentant ses amis et sa sœur sur les murs de sa chambre. J’entends F. chanter et je vois B. danser à longueur de journée. Je les vois jouer pendant des heures aux dominos. J’entends A. me dire tous les matins « Bonjour, bien dormi ? » parce que c’est l’une des premières phrases qu’il a appris à dire en français. Je les vois m’encourager lorsque j’essaie de parler arabe à mon tour. Je les vois boire des litres de lait et manger en quantité de la harissa. J’entend A. répéter en boucle « Canapé, ceinture, chaussures… » pour essayer de retenir ces quelques mots, et finir par y arriver. Je les vois sortir en tee-shirt, short et tongs alors que nous ne quittons pas nos manteaux. Je les vois mettre huit sucres dans leur thé et refuser de goûter du fromage. Puis finir par l’apprécier. Je souris lorsque M. me montre les photos de ses enfants, restés dans son pays. Je vois toujours A. sur son vélo être surpris d’apprendre que les filles en France apprennent aussi à en faire, contrairement à chez lui. Je vois O. couper les cheveux des autres résidents parce qu’il est un peu devenu le coiffeur attitré du centre.

 

Je ne savais pas trop comment donner un aperçu du quotidien au CAO. Je me suis dit que ce sont finalement toutes ces personnes singulières et toutes ces petites anecdotes qui donnent simplement vie à ce centre.

 

 

Élodie L., Intervenante social au CAO de Mérignac.

 

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